Philippe Kerhervé |Parc naturel marin Golfe du Lion

Portraits

Philippe Kerhervé, enseignant–chercheur à l’université de Perpignan

Comment êtes-vous devenu un spécialiste des déchets plastiques en mer ?

J’ai commencé ma carrière par l’étude des transferts de matériel sédimentaire des fleuves vers la mer. Les sédiments étant de plus en plus contaminés, j’en suis venu à étudier comment les polluants se retrouvent dans le milieu marin. Or, du fait de leur longue durée de vie, les plastiques sont les polluants les plus faciles à tracer… Cette évolution dans ma thématique de recherche s’est donc faite naturellement, si l’on peut dire !

Quelle est la source principale des plastiques retrouvés en mer ?

En Atlantique et en Manche, mer du Nord, une portion significative provient des activités maritimes comme la pêche et l’aquaculture. En Méditerranée, quasiment la totalité provient des bassins versants. L’afflux augmente donc lors des fortes pluies qui font déborder les fleuves…

En plus de votre activité scientifique, vous êtes engagé auprès de l’association Citeco66…

Leurs bénévoles ramassent des déchets sur les plages depuis quinze ans, sans voir de diminution. Confronter leur expertise du terrain à ma vision de scientifique nous semblait, à eux comme à moi, une bonne piste pour trouver des solutions.

Quelles sont les solutions ?

Une fois les déchets en mer, il est un peu tard pour intervenir. Mais il est possible de les retenir en amont, grâce à des dispositifs installés en travers des agouilles, ces canaux qui drainent la plaine du Roussillon. C’est ce que nous faisons dans le cadre d’un projet conjoint entre Citeco66 et l’Université de Perpignan, en concertation avec le Parc naturel marin. Appelé Redplast66, ce projet vise aussi à quantifier et à qualifier les déchets transitant par la Têt qui s’échouent sur les plages, et à sensibiliser la population, notamment les élus locaux.

Quel accueil recevez-vous de la part des élus ?

Beaucoup craignent qu’évoquer cette problématique ne nuise à la réputation de leur commune. Nous essayons de les convaincre que ce sont les déchets qui la ternissent ! Les plastiques envahissent tous les secteurs socio-économiques. Ils se retrouvent en montagne, dans la plaine, dans les villes. Cette pollution concerne donc tous les élus du département, pas seulement ceux du littoral. Il est vraiment urgent que, tous, nous prenions ce problème à bras le corps.